COP 27 / La Caravane africaine pour le climat prépare un nouveau front commun après des négociations internationales décevantes

Vendredi 18 novembre 2022
A la COP27 en Egypte, la société civile africaine a demandé plus d'aide aux africains pour faire face aux changements climatiques. Credit photo: Taiwo Aina / Oxfam

La Caravane africaine dresse un bilan mitigé de la COP27 en raison du manque de résultats concrets, tout en se réjouissant d’avoir pu apporter son témoignage et exprimer des demandes unies jusqu’à Charm-El-Cheikh, en Egypte. Elle prépare désormais la suite à donner à son mouvement.

La Caravane, initiée par plus de 170 organisations de la société civile africaine dans le but d’exiger la justice climatique, a d’abord parcouru 28 pays du continent[1] pour mener des centaines d’activités, avant de rejoindre la COP27 en Egypte.

Une délégation était sur place pour représenter les intérêts des communautés locales, à la fois en interpellant tous les acteurs présents sur la réalité des changements climatiques sur le continent africain, et en démontrant par l’exemple que les populations ne restent pas les bras croisés face aux impacts qui les touchent.

Un état des lieux contrasté

Après deux semaines d’intense mobilisation sur place, la Caravane africaine pour le climat fait un bilan en demi-teinte de la COP 27.
Elle déplore tout d’abord des résultats politiques maigres et décevants.

En effet, la Caravane attendait des mesures concrètes qui répondent aux aspirations des populations:

  • Un respect des engagements de l’Accord de Paris par les pays qui sont les principaux responsables de la crise climatique
  • Un respect de la promesse de mobiliser 100 milliards de dollars par an dès 2020, et la réhausse du montant de ces financements audelà de 2025, pour aider les pays en développement à faire face au dérèglement climatique.
  • Un doublement du financement de l’adaptation d’ici à 2025
  • Des mécanismes de contrôle et d’évaluation
  • La création d’un fonds de financement pour les pertes et dommages, et l’élaboration d’une feuille de route claire pour assurer sa pleine opérationnalisation d’ici 2024

« Les COP se passent sur la base de la Convention cadre des Nations-Unies sur les changements climatiques à laquelle ont adhéré les États participants. Et l’Accord de Paris engage les États signataires. Il est donc question de responsabilité, non de charité ou de mendicité », tient à préciser Azara Remalia Sanogo, conseillère régionale justice alimentaire et climatique pour Oxfam en Afrique de l’Ouest.

Dans le même temps, la Caravane africaine pour le climat se réjouit d’avoir pris part aux événements portés par la société civile présente en Egypte, d’avoir porté ses principaux messages auprès des institutions et officiels, et enfin d’avoir montré sa fermeté face aux principaux Etats pollueurs.

« Les solutions, on les connait, insiste Sena Alouka, fondateur des Jeunes volontaires pour l’environnement. Elles sont intrinsèquement liées aux connaissances locales et aux savoirs ancestraux qui règlent une grande partie des problèmes : l’agroécologie permet de restaurer l’équilibre entre la terre, les animaux et les hommes, l’alliance de la science et des savoirs paysans permettent de prévoir la météo et ainsi de mieux s’adapter, etc. Seulement, les financements sont majoritairement orientés vers la recherche dans le monde des énergies fossiles ou l’agriculture intensive, très peu vers les solutions portées par les citoyens. C’est un réel problème ».

C’est pourquoi, forte de cette première participation à une COP, la Caravane africaine pour le climat veut maintenir la pression sur les décideurs.

Associer les chefferies traditionnelles et imaginer la suite

« Pour la dynamique qu’elle a contribué à créer, la Caravane en valait la peine, analyse Massa Kone, porte-parole de la Convergence globale des luttes pour les terres et l’eau en Afrique de l’Ouest (CGLTE OA). Nous avons autant appris sur les problèmes rencontrés par chacun face aux événements climatiques extrêmes que sur les solutions et bonnes pratiques mises en œuvre par les uns et les autres pour s’adapter ou anticiper ».

En effet, sans les communautés, aucun changement structurel ne peut être engagé.

Et c’est précisément ce qu’a martelé la Caravane à Charm-El-Cheikh. « En conviant des activistes, des maraîchères, des chefs traditionnels, des chargé.e.s de plaidoyer, la Caravane a démontré l’importance et la richesse de la parole des communautés, a expliqué Dada Zéhé Mêtokan, Roi d’Agonlin (Bénin) et caravanier. Et les chefferies traditionnelles sont un maillon essentiel pour assurer la représentation.  Alors qu’elles sont de plus en plus constitutionnalisées dans nos Etats, elles n'étaient jamais parties prenantes aux négociations climatiques. Nous avons demandé que cela change ».

Pour continuer à entretenir les liens créés à l’issue de ce mouvement de mobilisation et faire bouger les lignes politiques, la Caravane africaine pour le climat va prochainement revoir sa méthodologie d’action. 

« Aujourd’hui, on s’aperçoit que la Caravane a les moyens d’être plus visible et donc plus impactante en dehors des enceintes des COP. En allant au plus près des communautés et en consolidant notre plaidoyer avec celui d’autres organisations – y compris en dehors des frontières de l’Afrique -  nous avons le sentiment que nous serons plus audibles par la communauté internationale », partage Oumou Aminata Drame, technicienne supérieure en agroécologie au Sénégal et membre de la CGLTE.
Un nouveau modèle sur lequel travaillera la Caravane africaine pour le climat dès le mois prochain à Abuja.

 

[1] Les 28 pays participants à la Caravane africaine pour le climat sont les suivants: Afrique du Sud, Burkina-Faso, Bénin, Cameroun, Centrafrique, Côte d’Ivoire, Egypte, Ethiopie, Gabon, Gambie, Ghana, Guinée, Kenya, Mali, Malawi, Maroc, Mauritanie, Mozambique, Niger, Nigeria, Ouganda, République démocratique du Congo, Sénégal, Tanzanie, Tchad, Togo, Zambie, Zimbabwe

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