À la défense du lait local au Sahel

Fatoumata est une fermière laitière qui parcourt chaque jour 20 km en vélo pour vendre son lait au marché et celui de sa communauté de Koto Dougo, au Burkina Faso. Crédit : Pablo Tosco / Oxfam

Fatoumata est une fermière laitière qui parcourt chaque jour 20 km en vélo pour vendre son lait au marché et celui de sa communauté de Koto Dougo, au Burkina Faso. Crédit : Pablo Tosco / Oxfam

« Tout ce que je gagne, je le dépense pour mes enfants »
Fatoumata, fernière laitière, Burkina Faso

Fatoumata est une fermière laitière qui vit dans la communauté de Koto Dougo, au Burkina Faso. Chaque jour, elle parcourt 20 kilomètres en vélo pour vendre son lait et celui des familles de sa communauté au marché de Bobo Diulasso. Elle collecte du lait auprès de 12 familles de sa communauté et cela lui prend une heure et demie pour aller et une heure et demie pour revenir du marché. Mais là ne commence pas sa journée.

Fatou se lève tous les matins à 6 heures du matin pour traire ses vaches, récupérer le lait des familles qui vivent avec elles pour aller le vendre. Une partie du lait récolté est le petit déjeuner des plus petits du village. Plus tard, à la ville, elle fait les achats dont elle a besoin et revient avec les fûts vides à sa ferme, ainsi que l'argent gagné de la vente qu’elle distribue aux femmes qui ont contribué avec le lait de leur bétail.

Fatou vit dans une ferme sans accès à l'eau. Les femmes doivent marcher un kilomètre par jour pour aller chercher de l'eau. Pendant qu'elle trait les vaches, ses filles et belles-filles vont chercher l'eau dont elles auront besoin pendant la journée pour leur propre consommation, pour la cuisine et pour le bétail.

Avec l'argent qu'elle retire de la vente, Fatou s'assure que chacune de ses filles et belles-filles dispose d'un peu d'argent qu'elles peuvent gérer elles-mêmes. Elle gagne chaque jour entre 2 000 et 3 000 FCFA par jour (3 à 4 euros).

Grâce au soutien d’Oxfam, Fatou a reçu de la formation à la transformation du lait en produits dérivés tels que le yaourt. Oxfam soutien également les mini laiteries de la région telles que «Kossan de l'Ouest» qui ont besoin d'une production laitière plus locale pour améliorer la qualité de leurs produits puisqu'elles n'ont pas la quantité nécessaire pour transformer les produits qui sont vendus et consommés localement avec uniquement du lait local et donc utilisent du lait en poudre importé d’Europe avec moins de nutriments.

Ibrahim Lido déchargeant des fûts de lait à Kossam de L'Ouest une usine de tri de collecte de dérivés du lait à Bobo Diulasso au Burkina Faso. Crédit : Pablo Tosco / Oxfam

#MonLaitEstLocal

Mon Lait Est Local est une campagne régionale de défense et de promotion du lait local, mise en place par une large coalition composée de plus de 55 organisations y compris des organisations paysannes d’éleveurs et d’agricultures, de consommateurs et consommatrices, de chercheurs et chercheuses, d’ONG (dont Oxfam), de mini-laiteries et d’industriels locaux. Cette campagne est soutenue par des ambassadeurs de renommée internationale et est active dans six pays: le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal, et le Tchad.

Cette campagne vise la promotion du lait local en Afrique de l’Ouest, mais aussi réclame des mesures concrètes par les décideurs politiques de la région pour mieux protéger cette filière locale.

En effet, depuis plusieurs années, des agroindustriels européens envahissent le marché du lait en Afrique de l’Ouest avec du faux lait en poudre ré-engraissé à l’huile de palme – dont la production détruit l’environnement- et qui est vendu jusqu’à 30, voire 50% moins cher que le lait produit localement. Cette concurrence déloyale étouffe les productrices et producteurs de lait en Afrique qui sont déjà affaiblis par la crise climatique et le manque de nourriture pour leurs animaux. Mal étiqueté, ce substitut au lait peut être confondu avec du vrai lait sans en avoir les qualités nutritives, ce qui peut nuire à la santé des consommateurs, dont les enfants.

Les agroindustriels européens profitent de faibles tarifs douaniers de la CEDEAO (5%) pour écraser la concurrence locale et incitent les transformateurs locaux à utiliser leurs produits au détriment de la santé, de l’environnement et de la survie de millions de petites productrices et petits producteurs.

À travers une pétition qui vise à recueillir 55 000 signatures, la campagne #MonLaitEstLocal demande à la CEDEAO plusieurs mesures concrètes pour protéger la filière locale du lait en Afrique de l’Ouest :

  • Accompagner les actrices et acteurs du secteur laitier afin qu’ils deviennent plus résilients face aux effets du changement climatique sur le long terme ;
  • Améliorer l’accès à l’alimentation bétail ;
  • Prendre des mesures pour augmenter le pourcentage de lait issu des exploitations familiales dans l’industrie laitière
  • Mettre en place des politiques commerciales et fiscales favorables au développement des chaînes de valeur du lait local.