RÉALITÉ N°2 – Les femmes et les filles face aux difficultés d’accès aux services sociaux

RÉALITÉ N°2 – Les femmes et les filles face aux difficultés d’accès aux services sociaux
Auteur-e(s): 
Aurore Mathieu
Date de publication: 
Jeudi 30 juillet 2020

Tiré de l'étude: Les femmes ouest-africaines face à la COVID

RÉALITÉ N°2 – Les femmes et les filles face aux difficultés d’accès aux services sociaux

Les inégalités entre les hommes et les femmes dans l’accès aux services sociaux de base (éducation, santé, justice) sont structurelles dans de nombreux pays de la région ouest-africaine. L’irruption de la pandémie du COVID-19 est venue renforcer ces inégalités, rendant l’accès à l’éducation et à la santé encore plus limité pour les femmes et les jeunes filles.

L’accès aux centres de santé a été encore plus réduit, principalement en zone rurale, en raison de la baisse des ressources financières des ménages, aux problèmes liés aux interdictions de mouvements et à la désinformation. Beaucoup de femmes ont en effet renoncé à fréquenter les centres de santé, non pas parce que ces centres étaient en surcharge ou ne fournissaient plus de services, mais par peur d’être contaminées par le virus ou par peur d’être stigmatisées par leurs communautés en cas de test positif. La distance géographique des centres de santé en zone rurale a rendu leur accessibilité compliquée avec les restrictions de mouvement et la mise en place des mesures de distanciation sociale, créant des attentes interminables et décourageant leur fréquentation. Les femmes, qui en temps normal recourent déjà tardivement aux soins (soit par manque de temps, soit par priorisation des soins aux enfants ou aux proches), sont particulièrement touchées et les risques pour leur santé, surtout sexuelle et reproductive, sont importants, parmi lesquels une augmentation de la mortalité maternelle et néonatale (comme cela s’est vu pendant la crise d’Ébola), une augmentation des grossesses non désirées, une augmentation des infections sexuellement transmissibles et une baisse du taux de planification familiale. Le risque de complication de maladies par manque de traitement peut également conduire à une détérioration générale de leur santé dans le long-terme. Pour les enfants, l’accès à la vaccination peut devenir plus compliqué. Dans certains pays, certains cas d’époux réfractaires à ce que leurs femmes se rendent aux centres de santé ont aussi constitué un obstacle à l’accès des femmes aux soins.

 

Les jeunes filles font face à des risques spécifiques. La fermeture des écoles risque de se traduire pour beaucoup d’entre elles par une déscolarisation dans le long terme, surtout lorsqu’elles sont sollicitées pour les tâches ménagères et les activités économiques. Elles font face aux risques de mariage précoce ou forcé, au travail forcé, à la prostitution et au risque de violences sexuelles. La difficulté d’accès aux centres de santé peut signifier un risque important de grossesses non désirées et de maladies sexuellement transmissibles surtout quand elles souffrent d’un manque d’information sur leur santé sexuelle.

 

Dans leur grande majorité, les femmes et filles ont des difficultés à s’adapter à la situation. Elles se tournent majoritairement vers l’automédication, avec tous les risques que cela comporte, et la pharmacopée traditionnelle, quand elles n’ont pas la possibilité de faire de prêts ou de s’endetter pour payer les frais de santé. Les femmes enceintes font appel aux matrones, les sages-femmes traditionnelles, pour le suivi de leur grossesse.

« Mon enfant a eu une angine mais je l’ai caché et je l’ai soigné avec des médicaments traditionnels pour éviter que l’on soit accusé d’avoir attrapé la maladie » raconte une femme dans un relais communautaire à Guédiawaye dans la banlieue de Dakar.

RECOMMANDATIONS

Face à cette situation, il est urgent de mettre en place des campagnes de sensibilisation et d’information pour communiquer sur l’accessibilité des centres de santé et sur les droits en matière de santé, à destination des hommes comme des femmes et des jeunes filles. Les États doivent favoriser le recrutement de personnel de santé féminin, créer des centres de santé sexuelle et reproductive de proximité (ou à défaut mettre en place des cliniques mobiles pour accéder aux zones rurales reculées et enclavées) et former des volontaires communautaires aux soins de santé primaire. De manière plus générale, la gratuité (ou a minima une subvention) des soins de santé reproductive et sexuelle pour les femmes et les jeunes filles ainsi que la disponibilité des produits d’hygiène menstruelle, de santé procréative et de santé primaire sont nécessaires. Dans le domaine de l’éducation, les gouvernements doivent veiller à minima à maintenir leur budget pour l’éducation (et à ne pas l’attribuer à d’autres domaines) et à mener des campagnes de sensibilisation pour le retour des filles à l’école dès la rentrée scolaire.

RÉALITÉ N°3 – Les femmes et les filles face à l’augmentation de leur vulnérabilité et des violences basées sur le genre (EN SAVOIR PLUS)

Réalité N°4 – Les femmes et les filles face à la crise alimentaire (EN SAVOIR PLUS)

Réalité N°5 – Les femmes face à la faiblesse de leur représentation et participation dans les espaces de prise de décision (EN SAVOIR PLUS)

RÉALITÉ N°6 – Les femmes et les filles face au manque d’accès à l’information (EN SAVOIR PLUS)

RÉALITÉ N°7 – Les femmes face au poids des normes sociales (EN SAVOIR PLUS)

RÉALITÉ n°1 – Les femmes face à l’arrêt des activités économiques (EN SAVOIR PLUS)

Présentation du rapport Les femmes ouest-africaines face à la Covid